Dans le cortège parisien avec des lycéens : « Si on ne se bat pas pour la retraite de nos parents, qui se battra pour les nôtres ? »

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Vidéo  Les épreuves de spécialité du baccalauréat terminées, les lycéens sont venus grossir les rangs de la mobilisation contre la réforme des retraites. Anxieux pour leur avenir, solidaires de leurs aînés, ils souhaitent faire entendre leur voix.

Peu visibles depuis le début des actions contre la réforme des retraites, les plus jeunes ont fait une entrée remarquée dans la mobilisation. Ce mardi 28 mars, si la place de la République à Paris est plus clairsemée que les précédentes journées de grève (la CGT décomptera en fin de journée 450 000 manifestants,  la préfecture 93 000), les lycéens ont répondu présents à l’appel de l’intersyndicale pour la dixième journée de mobilisation contre la réforme des retraites.

Depuis Clermont-Ferrand où il défile, le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez y voit « la preuve que le mouvement ne s’essouffle pas ». Dans le cortège parisien, entre les camions de la CGT, de l’UNSA ou d’Attac, une petite centaine de lycéens s’époumonent en musique autour du char de la Fédération indépendante et démocratique lycéenne (FIDL) : « La retraite à 60 ans, on s’est battu pour la gagner, on se battra pour la garder ! » Sur la place de la République, en attendant le départ de la manifestation, Franz-Kinan, 17 ans, brandit timidement sa pancarte « On joue pas au Uno, arrêtez les +2 ».

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Selon une note des renseignements territoriaux, que BFMTV a pu consulter, si les lycéens et étudiants étaient environ 30 000 lors de la dernière marche, jeudi 23 mars, leur présence ce mardi devait doubler, voire tripler. Il faut dire que les lycéens bénéficient d’un calendrier d’examens beaucoup plus souple que lors des premières journées de mobilisation. La semaine dernière, nombre d’entre eux ont passé les épreuves écrites de spécialités du baccalauréat général et technologique. Ils n’auront désormais plus d’épreuves d’ici juin.

Solidarité intergénérationnelle

« C’est de notre avenir dont il est question, mais aussi de celui de nos parents, parfois même de nos grands-parents », martèle Céline, 17 ans, lorsque l’on fait mine de s’étonner de voir de jeunes adultes se mobiliser. La lycéenne, en classe de terminale, rêve de devenir professeure. Tous les jours, à l’école, elle assure être confrontée « à des personnes d’un certain âge, qui pourtant travaillent encore ».

« Il faut entendre ce qu’on nous dit. Il faut que le gouvernement écoute. Ce n’est pas possible de continuer à enseigner correctement à 64 ans. A cet âge, on n’a plus l’énergie de s’occuper d’une classe de 40 élèves. On ne peut plus se renouveler, et cela pénalise aussi les étudiants. »

Thomas, 16 ans, élève de première dans le 77, se demande : « Si on ne se bat pas pour la retraite de nos parents, qui se battra pour les nôtres ? »

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Franz-Kinan et Kali, 17 ans, élèves en classe de terminale.

Franz-Kinan et Kali, 17 ans, élèves en classe de terminale. L’OBS / LOUIS MORICE

Autocollant de la FIDL collé sur la veste, Bianca, 16 ans, estime pour sa part que s’il est essentiel que les lycéens et les étudiants se mobilisent, c’est pour leurs proches, mais aussi pour eux. « Ça peut paraître lointain. Mais cette réforme nous impacte aussi, c’est de notre avenir aussi qu’il s’agit. » Et de justifier : « Le marché du travail pour les jeunes est saturé, on n’a déjà pas assez de place. Alors comment faire s’il y a encore plus de gens pour un nombre de jobs équivalents ? » Elève en classe de seconde, elle assure que cette réforme pourrait faire peser sur son choix de faire, ou non, des études longues.

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Ce doute, Myriam le partage aussi. A 17 ans, elle passe le bac cette année, mais elle n’a encore qu’une vague idée de ce qu’elle souhaite faire plus tard. Or, pour elle, cette réforme « ne laisse plus aux jeunes le droit de se tromper ».

« On nous répète à longueur de temps que perdre un ou deux ans dans une filière qui finalement ne nous correspond pas, ce n’est pas grave. Mais deux ans, ce sont des semestres cotisés en moins et autant d’années en plus de travail. On a l’impression de ne plus avoir le droit à l’erreur… »

« Et si on se trompe, quand est-ce qu’on pourra profiter de notre vie ? », complète Bianca. Présente à presque toutes les manifestations depuis janvier, elle se plaît à dire que sa génération est « une des plus solidaires ». « Et même si ce n’est pas pour demain, les jeunes doivent comprendre que la réforme va aussi les impacter. »

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Le 49.3, « une sorte de baguette magique pour faire taire la démocratie »

Pour beaucoup, le 49.3 a été la goutte de trop. Dilan, 16 ans, se dit « choquée » par l’utilisation de l’article très controversé. C’est son utilisation, le 16 mars dernier, qui l’a convaincue de battre le pavé pour la première fois ce mardi. « On sent que notre avis ne compte pas, que celui des députés ne compte plus. En utilisant le 49.3, Emmanuel Macron bafoue tout principe démocratique. »

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Myriam s’est aussi décidée à protester contre « ce déni de démocratie ». Elle admet qu’elle avait jusqu’alors du mal à se sentir totalement concernée par la mobilisation, « mais ce passage en force m’a révoltée », confie-t-elle.

« On a l’impression, avec nos politiciens, qu’on ne vit pas dans la même réalité. C’est inadmissible de faire passer une réforme d’une telle importance par ces moyens-là, alors qu’une grande majorité de Français sont contre. »

C’est pourtant simple, selon l’élève de terminale : « Et c’est dans notre programme de SES ! Les conditions de travail ont un impact sur la productivité. On ne peut pas être productif, bien travailler si on ne se sent pas reconnu en tant que citoyen. Et faire travailler des citoyens jusqu’à 64 ans, ce n’est pas normal. »

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Avec elle, dans le cortège, on retrouve Céline. La jeune fille a déjà participé à trois journées de grève. Mais le 49.3 a encore renforcé sa détermination. « Avec cet article, le gouvernement utilise une sorte de baguette magique pour faire taire la démocratie. On ne peut pas se laisser faire. Si la jeunesse s’y met, on peut faire plier le gouvernement. »

Myriam et Céline, 17 ans, élèves en classe de terminale.

Myriam et Céline, 17 ans, élèves en classe de terminale. L’OBS / LOUIS MORICE

Interrogés, les lycéens avouent avoir du mal à se projeter dans un monde du travail si mouvant. « Tout peut encore changer. On ne sait pas ce qui nous attend », regrette Thomas. Lui veut devenir « artiste ». Et à 60 ans, il espère pouvoir profiter d’un repos bien mérité. « Ça, c’est dans un monde idéal. Vu celui dans lequel nous vivons, je pense que je serai toujours en train de travailler, avec mon arthrite… » Tous doutent d’avoir un jour accès à une retraite « décente ». Tous espèrent malgré tout arriver à « profiter » de cette période de leur vie.

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