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Fête des Mères et "boîte à larmes"

- André MENRAS / HỒ Cương Quyết — published 26/05/2013 23:10, cập nhật lần cuối 26/05/2013 23:16
Arrivé dans mon bureau, comme poussé par une irrésistible force, j’ai ouvert la vieille boîte métallique de biscuits où ma mère a conservé comme un trésor les télégrammes et autres documents officiels, les lettres de prison largement biffées au feutre noir par la censure, les vieilles coupures de journaux qui parlaient de son fils, dans un pays lointain, derrière des barreaux... Elle l’appelle « ma boîte à larmes ». Je la lui ai empruntée pour la garder chez moi, loin de son regard, pensant naïvement épargner à son cœur la résurgence de l’angoisse obsessionnelle que sa vue réveillait. Mais, c’est évident, la boîte est restée bien présente, bien ouverte dans sa tête.



Fête des mères et

« boîte à larmes »


André MENRAS HỒ Cương Quyết


Aux mères des "Tà Ru" (*) d’hier d’aujourd’hui et de demain
avec une pensée pour celles des "Tà Ru" pêcheurs


Ce jour de la fête des mères, j’ai apporté des fleurs blanches bien parfumées. Clouée dans son fauteuil, ses yeux, d’ordinaire éteints se sont brusquement rallumés. Est-ce le parfum de la rose ? Elle m’a souri et ses pauvres petites lèvres ont dit : « - ah, tu es là… » Puis sa pensée et son regard apaisés ont fui quelque part vers le ciel, derrière la fenêtre, comme pour suivre les nuages.  Rides de son visage fripé, profondes ou fines. Lesquelles ont été creusées par les années d’angoisse de ne jamais revoir son fils unique ? Lesquelles ont été, sans le vouloir vraiment, offertes aux mères vietnamiennes, partagées avec elles dont elle ne connaissait pas le pays, mères « héroïnes » ou « ordinaires » ? Certainement ce sont ces rides partagées qui sont les plus profondes. Elles s’enracinent dans le cœur et rien ni personne ne pourra jamais les effacer.

–   Tu ne pars pas encore ?

–   Mais non, maman, je ne pars pas.

Je suis rentré chez moi pour quelques heures.. . Pendant que je roulais, une foule d’images du passé et du présent mêlés se bousculaient dans ma tête. Arrivé dans mon bureau, comme poussé par une irrésistible force, j’ai ouvert la vieille boîte métallique de biscuits où ma mère a conservé comme un trésor les télégrammes et autres documents officiels, les lettres de prison largement biffées au feutre noir par la censure, les vieilles coupures de journaux qui parlaient de son fils, dans un pays lointain, derrière des barreaux... Elle l’appelle « ma boîte à larmes ». Je la lui ai empruntée pour la garder chez moi, loin de son regard, pensant naïvement épargner à son cœur la résurgence de l’angoisse obsessionnelle que sa vue réveillait.   Mais, c’est évident, la boîte est restée bien présente, bien ouverte dans sa tête.

 Fête des mères, je pense à vous milliers, centaines de milliers, millions de « boîtes à larmes » de toutes matières, de toutes formes, pieusement rangées dans les meubles ou dans les cœurs par d’innombrables mères vietnamiennes, françaises, américaines dont les yeux restent secs pour avoir trop pleuré !

Aujourd’hui, alors que les bombes depuis plusieurs décades, ont cessé de tomber sur mon deuxième pays, des « boîtes à larmes » continuent de s’ouvrir. Par centaines peut-être par milliers. Chaque jour de nouvelles viennent se rajouter à ce cruel cortège. Ouvertes et refermées dans un triste rituel, à l’abri des regards, par de pauvres petites mains tremblantes bien seules dans la douleur, malgré les témoignages de solidarité.

En ce moment, je pense à deux « boîtes à larmes » ouvertes sous les feux de l’actualité: celles des mères de Phuong Uyen et de Kha. Deux jeunes courageux, dignes, droits, l’œil clair et sec devant leurs juges, devant un pouvoir qui tremble comme celui que beaucoup d’entre nous ont vu trembler quand nous avions 20 ans. Un pouvoir qui condamne d’autant plus fort qu’il se sent lui-même condamné.

Non, messieurs les juges, ne me dites pas que ces jeunes sont des terroristes qu’ils appellent à la violence ou au régime passé. Oui, ils ont imprimé le drapeau de VNCH, ce drapeau dont j’ai mesuré dans ma chair et dans les souffrances de mes amis toute la violence, la sauvagerie qu’il pouvait représenter, dans la société et dans les innombrables prisons, officielles ou cachées sur lesquelles il flottait. Mais nos deux jeunes amis connaissaient-ils la vraie nature de ce régime ? Leur dignité de vietnamiens n’a-t-elle pas seulement retenu de lui sa fermeté sur la défense de la mer et des îles ancestrales face aux appétits de Pékin, alors que le parti communiste vietnamien est loin d’avoir fait preuve de cette même fermeté nationale? Ma conviction est qu’ils ont imprimé ce drapeau par défi et parce qu’ils ne voyaient pas d’autre alternative à laquelle se référer pour s’opposer à l’actuel régime policier de plus en plus perçu comme liberticide, corrompu, lâche par sa collaboration avec l’agresseur chinois. Ont-ils dit, écrit de « vilaines choses » sur les dirigeants de Pékin ? Ils ont raison ! Mille fois raison et devraient en être félicités ! Je suis persuadé que si ces deux jeunes avaient vécu à la fin des années 60, ils se seraient trouvés dans les manifestations étudiantes contre l’agresseur américain et le régime qui le servait. Ils auraient certainement imprimé des tracts avec le drapeau du Front national de libération ! Ils auraient peut-être comparu comme nous devant les tribunaux militaires de VNCH et été envoyés par ce régime, après les tortures habituelles , dans les bagnes de Thu Duc, Tan Hiep, Chi Hoa, Con Dao , Phu Quoc…La vérité, vous le savez messieurs les juges, est toute simple : ces jeunes ont un amour légitime, un respect et une ambition pour leur pays et pour leur peuple. Leurs indignations quotidiennes de voir ces aspirations bafouées les ont poussés au courage de l’action. Une action saine, claire, logique qui devient chaque jour plus nécessaire et qui poussera de plus en plus de jeunes sur ce chemin car, malgré tous les discours de propagande, la réalité des évènements leur montre qu’il ne faut rien attendre de bon de la part de la dent de Pékin ni de sa lèvre : le parti communiste vietnamien actuel. Les deux « noi mot dang, lam mot neo » pour objectivement et finalement se retrouver toujours unis sur l’essentiel : leur survie au pouvoir. Les deux utilisent la violence, la peur et la manipulation comme arguments majeurs de communication. Les deux sont absolument étrangers à la vraie démocratie et sont en réalité devenus étrangers à leurs peuples. Je suis convaincu que Phuong Uyen et Kha ont imprimé le drapeau de l’ancien régime plus par révolte que par adhésion politique ou idéologique. Et, même si cela n’avait pas été le cas, je continuerai de souscrire à cette phrase de Voltaire que tout dirigeant politique du XXIème siècle devrait faire sienne : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites mais je me battrai jusqu’à la mort pour défendre votre droit de le dire ».

Aujourd’hui, le seul véritable choix passe par là. La voie vers le progrès durable, quel que soit le nombre des procès à venir, n’est ni dans le régime policier, liberticide de soumission à l’agression chinoise. Il est encore moins dans un retour nostalgique à une dictature de guerre au service inconditionnel d’une agression militaire étrangère. Le seul choix se trouve dans un combat pacifique, déterminé et sans concession pour une voie démocratique, aux couleurs du Vietnam, dans une véritable  union nationale et réconciliation nationale, dans le respect des choix populaires librement exprimés. C’est la seule voie pour enrayer cette guerre larvée, silencieuse, qui se dessine à nouveau, en résistance à l’agression, à la soumission et au déshonneur. C’est la seule voie pour sauver le pays. C’est la seule voie pour reléguer au musée de la douleur toutes les « boîtes à larmes », pour repousser celles qui menacent de s’ouvrir dans toutes les couches de la société vietnamienne, des milieux les plus populaires aux intellectuels. Si les dirigeants qui pensent toujours orchestrer seuls le sort de la nation persistent dans leur choix de folie les « boîtes à larmes »  ne tarderont pas à s’ouvrir jusque dans les familles des juges qui croient en être à l’abri.

En ce jour de fête pour toutes celles qui ont donné la vie en ne pensant qu’au bonheur,  je n’oublie pas, bien sûr, les pauvres mères de tous les « tu do cai c** » comme celui du district 3 de HCM ville, de tous les Minh de Ha Noi et d’ailleurs qui adorent piétiner le visage d’honnêtes et paisibles citoyens patriotes sans défense, de tous les voyous qu’ils commandent et qui sortent la barre de fer au détour d’une ruelle, en échange de quelques os de récompense. Voltaire et la Liberté, bien sûr, n’ont pour eux aucun sens car la société qu’on leur a proposée ou leur histoire personnelle les ont dépouillés de leur humanité. Ils sont à ce point aveuglés par la spirale de violence, d’ignorance et de manipulations où le pouvoir les invite et les maintient, ils sont à ce point grisés par leurs petits pouvoirs du moment qu’ils les pensent être éternels. Ils ne mesurent pas la force d’un idéal populaire et patriotique ni les conséquences pour eux-mêmes de leurs actes criminels contre leurs compatriotes, contre leur peuple. L’honnêteté intellectuelle, la solidarité, le sens du sacrifice leurs sont étrangers. Dans un monde où il devient de plus en plus difficile de longtemps se cacher, de cacher ce que l’on dit et ce que l’on fait, savent-ils, les malheureux, qu’ils sont en train, par leurs coups, leurs insultes et leurs prisons, d’ouvrir une autre boîte, une boîte de Pandore  d’où sortirons de nouvelles « boîtes à larmes » avec, parmi elles, celles de leurs propres mères et de leurs propres épouses ?

André MENRAS HỒ Cương Quyết




(*) "Tà Ru" : mot par lequel des anciens prisonniers du régime saigonnais
(1954-1975) s'appellent (par dérision). Par extension, il désigne aussi les anciens détenus
du nouveau régime, soi-disant "socialiste".

Voir la traduction de ce texte en vietnamien :
Ngày của Mẹ và những "hộp đựng nước mắt".


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