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Premières appréciations sur l’actuel conflit sino-vietnamien

- Trần Ngân — published 07/06/2014 23:30, cập nhật lần cuối 08/06/2014 02:37
Les raisons pour lesquelles la Chine a déployé cette plate-forme au Vietnam ont fait l’objet de nombreuses analyses qu’on ne rappellera pas ici. Le présent texte s’attachera seulement à analyser l’impact de cette action sur l’économie et la société vietnamiennes.



Premières appréciations sur
l’actuel conflit sino-vietnamien



TRẦN NGÂN


La Chine a installé la plate-forme de forage Haiyang 981 dans l’espace maritime du Vietnam le 2 mai 2014, il y a plus de deux semaines, et au cours de ces semaines suffisamment d’évènements ont eu lieu au Vietnam pour autoriser quelques premières considérations sur un problème qui, au départ, ne se semblait pas avoir de telles dimensions. Les raisons pour lesquelles la Chine a déployé cette plate-forme au Vietnam ont fait l’objet de nombreuses analyses qu’on ne rappellera pas ici. Le présent texte s’attachera seulement à analyser l’impact de cette action sur l’économie et la société vietnamiennes.


1. Des impacts importants sur l’économie et la société


Depuis que la Chine a annoncé l’installation de la plate-forme dans les eaux du Vietnam le 2 mai, de nombreux et importants troubles socio-économiques ont eu lieu, notamment dans la semaine du 8 au 15 mai.

  • Le marché boursier a fortement chuté : Le 15 mai, l’indice boursier avait perdu tout ce qu’il avait gagné au cours des 4 derniers mois. Dans les 8 derniers jours, le marché a perdu 6 milliards USD dont 3 milliards pour la seule journée du 8 mai. Il s’agit de la plus forte baisse journalière jamais enregistrée et la Commission des opérations de bourse a dû publier un communiqué afin de rassurer les investisseurs (cf. An Ninh Thủ  Đô).

  • Les cours du dollar et de l’or ont fortement augmenté : Le tael d’or voit son prix s’accroître de plus de 1 million de dong en une semaine, le dollar américain atteint son prix-plafond, l’inquiétude incitant la population à des retraits bancaires pour acheter de l’or et du dollar. La Banque centrale de nouveau doit publier un communiqué pour calmer d’opinion.

  • Les manifestions ont donné lieu à des violences dans plusieurs provinces : Rien que dans la province de Bình Dương, « selon un rapport syndical, près de 700 entreprises ont subi des dommages, dont 350 des dommages graves, notamment 27 entreprises incendiées. Le nombre d’entreprises obligées de cesser temporairement leurs activités dépasse 800 ; le nombre d’ouvriers contraints de chômer dépasse 290 000. Président de la fédération syndicale de Bình Dương, Lê Thành Nhơn ajoute qu’à la suite des incendies d’usines, environ 100 000 ouvriers ont perdu leur emploi ou sont en chômage de longue durée » (cf. Lao Động). Dans la province de Đồng Nai, « environ 300 entreprises taiwanaises et chinoises ont arrêté leurs activités pour évaluer la situation et les possibilités de reprise, mettant au chômage 140 000 travailleurs » (cf. Sống Mới). Dans la province de Hà Tĩnh, les violences ont fait deux morts et près de 150 blessés.


2. Une appréciation des évènements


A partir des évènements précédents, il est possible de dégager un certain nombre d’appréciations :

  • Que des troubles importants se soient déroulés dans un court laps de temps révèle que le Vietnam actuel a beaucoup trop de points faibles et qu’il recèle en germe une instabilité potentielle sur tous les plans économique, politique et social. Certes ces points faibles et ses germes d’instabilité avaient été reconnus, rappelés, mais beaucoup de personnes ne pensaient pas qu’ils se manifesteraient avec une telle intensité et dans un temps aussi court. L’économie vietnamienne, qui n’est pas sortie de son marasme, entretient une instabilité psychologique, un manque de confiance dans l’activité économique et la régulation du gouvernement (les marchés de l’or, du dollar et des valeurs boursières étant les lieux privilégiés d’expression de cette défiance). La vie des travailleurs – dont on nous dit qu’ils forment la « classe de l’avant-garde » – se situe proche du niveau-plancher de la société. La rémunération de la plupart des ouvriers, notamment ceux des entreprises à capitaux étrangers, permet juste d’assurer leur subsistance mais en aucun cas une vie décente et une espérance dans l’avenir. Les travailleurs ne disposent pas non plus de représentants syndicaux véritables qui portent leurs voix et luttent pour leurs aspirations. Ce que montre le déchaînement de la violence ouvrière, même si elle a été excitée délibérement et amplifiée par la psychologie des foules, c’est bien l’insatisfaction des travailleurs quant à leurs conditions de vie. Quant à « la prise de conscience de la classe ouvrière de son rôle historique », comme le proclame la propagande du Parti, c’est bien loin d’être le cas.

  • Le grand bénéficiaire de cette situation est évidemment la Chine. Il lui a suffi d’installer une plate-forme de forage dans les eaux du Vietnam – acte qui ne lui demande pas beaucoup d’efforts – pour provoquer un ébranlement à la fois de l’économie et de la société vietnamiennes. Ce test a révélé les points faibles du Vietnam et, à l’avenir, la Chine saura où porter des coups pour le déstabiliser. Elle est passée maître en ce domaine. Pékin a compris qu’il pouvait aisément provoquer une instabilité interne qui empêche le Vietnam de mobiliser toutes ses forces dans une confrontation avec la Chine. Connaissant les points faibles et capacités de son adversaire, Pékin s’engagera d’autant plus résolument dans une politique d’empiètement de la souveraineté vietnamienne. Telle est la menace à court terme la plus évidente.

  • Par ailleurs, on ne peut pas ne pas s’interroger sur l’implantation par Pékin de nombreux agents au Vietnam. On ne peut l’exclure même aux niveaux les plus élevés des forces de sécurité. Car comment se fait-il que la sécurité vietnamienne si efficace dans la répression des manifestations de l’opposition pacifique se montre aussi laxiste face aux manifestations de violence de ces dernières semaines. Au début, on a cherché à expliquer l’explosion de violences à Bình Dương par l’effet de surprise, mais elle s’est poursuivie durant deux jours et à une grande échelle, détruisant jusqu’à 700 usines, tandis que l’intervention des forces de sécurité s’est révélée des plus faiblarde. Dès la seconde journée, les autorités auraient pu prévoir que les violences allaient s’étendre aux zones industrielles de la province adjacente de Đồng Nai, mais aucune mesure énergique n’a été prise pour empêcher cette propagation. Que les autorités, après ce qui s’est passé à Bình Dương et Đồng Nai, aient laissé les manifestations de violence s’installer dans la province de Hà Tĩnh – alors que les manifestants au départ n’était qu’un petit groupe d’une quarantaine de personnes – est encore plus incompréhensible. Il est possible que des meneurs aient été des hommes de main Pékin, car les violences très organisées ont pris rapidement de l’ampleur. Mais il se peut que les organes de sécurité eux-mêmes aient été aussi sous influence, car leurs réactions ont été particulièrement inefficaces.

  • Ces semaines pleines de troubles ont dévoilé une faille fatale au sommet de l’appareil de direction du pays, à savoir son excessive lenteur à réagir dans des situations d’urgence et le peu d’efficacité de ses réactions. La lenteur avec laquelle les plus hauts dirigeants vietnamiens se sont exprimés lorsque Pékin a déployé la plate-forme de forage en Mer de l’Est pourrait encore se justifier par des raisons de politique. Mais, lorsque les violences se sont répandues, secouant l’ensemble de la société, on n’a entendu aucune déclaration d’aucun ministre du gouvernement. Et dans son allocation de clôture du 9e Plénum du comité central du Parti, le secrétaire général, imperturbable, a discouru sur le thème fumeux de « l’édification de l’homme à culture socialiste » puis sur la menace d’une « évolution pacifique » au Vietnam. Il est clair que l’appareil de direction à son sommet ne s’était pas préparé à la menace de guerre étrangère agissant aussi de l’intérieur, et à faire face à une déstabilisation économique et sociale de grande envergure. Si on examine la composition du bureau politique du Parti, on relève que sur ses seize membres, cinq – Nguyễn Phú Trọng, Đinh Thế Huynh, Phạm Quang Nghị, Tòng Thị Phóng, Tô Huy Rứa – viennent des secteurs de l’agitation et de propagande. Qui connaît le Vietnam sait qu’il s’agit de secteurs en général conservateurs, aux idées surannées et à la vision simpliste sur ce qu’est l’ennemi. En général, leurs connaissances sont en retard sur le niveau moyen de la société et, évidemment, sans comparaison avec celui des dirigeants politiques expérimentés de la Chine. On comprend qu’au sommet de la direction vietnamienne, la priorité soit donnée à la propagande et à la stabilité politique interne, plus qu’à la capacité à faire face une déstabilisation de nature stratégique venue de l’extérieur.


La paralysie politique du Vietnam ces dernières années n’est pas un problème nouveau. Dans l’économie, la direction vietnamienne se trouve bloquée face aux réformes structurelles à long terme. Le clan conservateur est parvenu à faire reculer le processus de rénovation en imposant, notamment dans la Constitution de 2013, le rôle prépondérant dans l’économie des entreprises étatiques. L’urgence de la situation exigerait une composition de la direction autrement plus efficace.


3. Quelle voie pour le Vietnam ?


Dans le futur, le Vietnam devra faire face à des problèmes extrêmement difficiles.

  • Une économie malade ayant perdu sa dynamique de croissance. Les réformes de structures, notamment celle du secteur des entreprises étatiques, traînent fortement des pieds [1]. Le secteur le plus performant, celui des entreprises à capitaux étrangers, se retrouve dans un état désastreux après les violences qui les ont prises pour cible. La « stabilité politique » dont le régime est fier, le vantant comme un atout attractif pour les investisseurs étrangers, a montré son caractère illusoire après ces manifestations de violence.

  • La perte de confiance gagne de plus en plus la population et va s’aggraver si la menace d’un conflit armé avec la Chine et l’état d’instabilité sociale perdurent.

  • Le nationalisme de la population, parfois extrémiste, réclame des actes plus énergiques contre les empiètements chinois.

  • La menace de déstabilisation venant de Pékin. La Chine possède suffisamment de ressources et d’expériences pour déstabiliser économiquement et socialement le Vietnam. Après ce qui vient de se passer, Pékin a clairement « donné une leçon au Vietnam » dès que celui-ci entend lui tenir tête.


Quel avenir pour le Vietnam et que doit-il faire pour préserver son intégrité territoriale ? La question n’a pas de réponse évidente car celle-ci dépend de nombreuses variables.


Pour l’opinion éclairée, ou du moins sa majorité, la meilleure façon de défendre la souveraineté territoriale du Vietnam est de quitter « l’orbite chinoise », de démocratiser la vie politique et libéraliser la vie économique afin de faire du Vietnam un pays fort, d’intégrer les normes civilisationnelles communes à l’humanité de sorte que le Vietnam ait plus d’amis dans le monde. Cette voie se heurte à un obstacle de taille que représente l’idéologie du parti au pouvoir.


A mon avis, la plupart des membres du Parti, surtout ceux qui sont en bas de la hiérarchie, sont des « patriotes » sincères, mais qui croient sincèrement aussi que le mode de gouvernement actuel du Parti – c’est-à-dire le maintien de l’idéologie unique, la restriction de la démocratie et de la liberté d’opinion, la limitation de la société civile… – reste la meilleure façon de défendre le pays. C’est le drame des communistes qui demeurent fidèles au Parti. Ils croient que la répression afin de maintenir la « stabilité » politique, la limitation de la liberté d’opinion afin de créer le « consensus » et l’accroissement des dépenses destinées à la défense permettront de renforcer la capacité de résistance du Vietnam face à la Chine. (…)


Pour ma part, j’estime que les dirigeants vietnamiens vont chercher à maintenir leur pouvoir absolu mais n’oseront plus manifester leurs liens d’amitié avec Pékin. Le discours célébrant l’ami des « 4 bonnes relations » et des « 16 termes en or » [*] n’aura plus cours, mais les dirigeants vont profiter de la violence des manifestations anti-chinoises pour consolider la base de leur pouvoir. Les régimes totalitaires excellent dans ce domaine. On voit déjà la propagande accuser le Viet Tan (une organisation anti-communiste de la diaspora) d’être derrière les « manifestations illégales » afin d’interdire toute manifestation qui ne serait pas organisée par l’Etat [2]. Les dirigeants profiteront également de l’esprit patriotique pour réclamer « l’union nationale » autour du gouvernement, au détriment de la lutte contre la corruption, les inégalités sociales, les expropriations foncières…


Le Parti sait qu’il ne peut pas compter sur la classe ouvrière dont le bas « niveau de conscience politique » pourrait mener, s’il lâchait la bride, à une sorte de « Printemps arabe ». Dans ces conditions, la sécurité et dans une certaine mesure l’armée sont les seules forces auxquelles le Parti peut se fier. Toutefois, il n’est pas impossible que les enquêtes sur les violences passées découvrent parmi les responsables de la sécurité et de l’armée des agents de Pékin et les sanctionnent.


En fin de compte, ce qui est le plus probable, c’est que les dirigeants vietnamiens vont prendre leurs distances avec Pékin, pas pour s’écarter du modèle chinois et son idéologie, mais pour s’écarter de la « nation » chinoise. Toutefois, comment une reproduction défectueuse de la Chine, incongrue et isolée dans un monde civilisé, peut-elle résister à la Chine [3]  ?

Trần Ngân




Texte publié sur viet-studies le 18.5 2014


©  traduction française de Hải Vân




[1] Il semblerait que depuis le début de cette année, le premier ministre Nguyễn Tấn Dũng veuille activer le processus d’actionnarisation et privatisation des entreprises étatiques, ce qu’il s’était abstenu de faire durant son premier mandat. Visant le poste de secrétaire général du Parti au prochain congrès, il se peut que Nguyễn Tấn Dũng ne veuille pas laisser à son successeur à la tête du gouvernement la vache à lait que constitue la supervision des entreprises étatiques, notamment les groupes monopolistiques dont le contrôle a permis à Dũng d’asseoir son pouvoir.

[2] Dernièrement, une rumeur s’est répandue sur la toile selon laquelle, après les violences qui ont eu lieu dans les zones industrielles, des groupes d’individus continueraient à payer des gens pour qu’ils descendent dans la rue. Il suffit de réfléchir tant soit peu pour comprendre qu’il s’agit d’un bobard : car si de tels groupes existent, comment échapperaient-ils aux forces de sécurité ? Par ailleurs, le Viet Tan n’est pas aussi stupide pour organiser des violences au Vietnam au risque de tomber sous le coup de la législation anti-terroriste américaine.


[3]  Une constance de l’histoire du Vietnam est qu’après avoir vaincu l’invasion de la Chine, toutes les dynasties se sont mises à reproduire presque à l’identique les institutions, le droit, et l’organisation de l’Etat chinois. Si le Japon et la Corée ont pu se détacher du modèle chinois, le Vietnam n’a pratiquement jamais réussi à s’en échapper. Même aujourd’hui, à l’intérieur du Parti, ceux ont le plus « l’esprit national » et sont le plus « anti-chinois » adoptent de façon consciente ou non le modèle chinois. A mon avis, le concept d’ « indépendance nationale » aujourd’hui ne peut signifier simplement l’indépendance « territoriale » : il implique encore d’échapper à la dépendance économique, idéologique, institutionnelle.


(*) Devises énoncées par Pékin pour "consolider" l'amitié sino-vietnamienne.
Les « 4 bonnes relations » sont : bon voisins, bons amis, bons camarades, bons partenaires.
Les « 16 termes en or » formulent quatre politiques : voisinage amical, coopération intégrale, stabilité durable, orientation future.

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