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Comment je suis devenu Vietnamien

- André Menras — published 01/12/2009 22:00, cập nhật lần cuối 02/12/2009 16:42
Le 1er décembre 2009, le Président de la République Nguyễn Minh Triết a remis à André MENRAS son attestation de nationalité vietnamienne.


Comment je suis devenu Vietnamien



André MENRAS



Je suis arrivé au VN pour la première fois en septembre 68, alors que la guerre faisait rage, quelques mois après l’offensive générale du Tet Mau Than au Sud et en pleine effervescence des mouvements étudiants et ouvriers en France pour une société plus libre et plus juste. A cette époque-là le Vietnam était sous les projecteurs de l’opinion mondiale et la propagande américaine était distillée chaque jour par les télévisions de tous les pays capitalistes sous forme d’images fortes aux commentaires bien choisis. Je faisais partie des millions de jeunes européens qui ne faisaient pas de politique et je suis arrivé au Vietnam avec ces images télévisées dans la tête qui m’avaient rendu inconsciemment plutôt favorable aux « vaillants  libérateurs américains » plutôt qu’aux « cruels communistes ». Quelques mois à Da Nang et à Saigon ont suffit pour me convaincre du contraire et au fur et à mesure des souffrances, des crimes des humiliations, de la misère et des résistances dont j’ai été témoin je me suis mis à haïr l’arrogance de l’agresseur américains, la soumission intéressée de ses serviteurs saïgonnais et la sauvagerie de certaines de ses armées alliées. A tel point que plus j’avais des amis parmi les jeunes, plus je sortais de mon lycée et ouvrais les yeux et les oreilles, plus je me sentais glisser de l’état de Français bien tranquille et neutre à celui de Vietnamien en colère. Au bout de deux ans de séjour j’en étais arrivé au point où, si on m’en avait donné l’occasion, j’aurais volontiers pris les armes pour entrer dans le maquis. J’étais aussi très fâché de l’attitude d’une partie de la communauté française de Saigon qui allait à la soupe américaine et qui considérait les jeunes coopérants que nous étions trop curieux, trop sincères et trop républicains dans leurs valeurs. Nous étions des témoins gênants de leurs petits business complice avec l’occupant. Sur ce point encore je me sentais plus vietnamien que Français. Tous ces ingrédients ont constitué un mélange détonant qui, avec un autre jeune collègue, m’a amené à l’action du drapeau du Front national de Libération planté devant l’assemblée du régime de Saigon. Cet acte n’était pas seulement solidaire. A travers lui, tout en agissant conformément aux valeurs de jeune enseignant de la république française et en faisant honneur à l’éducation que m’avaient donnée mes parents, j’accomplissais un acte vietnamien. J’épousais sans aucune ambigüité et sur la ligne de front la cause d’un Vietnam qui relevait la tête. Par cette action, je sentais déjà de façon indéfinissable que le Vietnam s’installait durablement en moi un peu comme un pacte de sang. Bien sûr la prison, la réaction de rejet des autorités française qui nous abandonnait lâchement à notre sort, les tabassages des mat vu de Thieu, puis des gardiens de prison m’ont poussé toujours plus dans le camp du Vietnam. Les amis vietnamiens emprisonnés à Chi Hoa étudiants, lycéens, intellectuels, du phong trao, les paysans du kich les communistes convaincus m’ont accueilli les bras ouverts. Ils ont établi avec nous une liaison permanente et dangereuse pour eux. C’est à ce moment-là que j’ai appris à lire le vietnamien pour déchiffrer les messages écrits en lettres minuscules sur des petits bouts de papier, pour recevoir les informations et les communiquer , pour résister. C’est là qu’à l’occasion du Tet 1971, j’ai reçu de la bouche de Nguyen van Quoi, représentant des prisonniers politiques de la cellule OB1 le nom de Ho Cuong Quyet. Quoi évadé ensuite du bateau qui le déportait au bagne de Con Dao est mort en combattant à Cu chi en 72, enterré vivant en pleine nuit par une bombe de B52. Ce nom de Ho Cuong Quyet, nom de combat et de grand honneur puisque lié à la mémoire du Président Ho Chi Minh a toujours été et restera mon nom vietnamien directement lié au souvenir de Quoi et de ses amis disparus ou vivants…

C’est dans la prison que j’ai appris l’Histoire profonde du long combat pour l’indépendance du peuple vietnamien, l’Histoire et certains écrits de ses leaders comme le Président Ho Chi Minh, le général Giap – que j’ai eu la joie et le grand honneur de rencontrer il y a quelques mois à Ha Noi…

C’est aussi dans la prison que j’ai appris de mes amis vietnamiens la véritable histoire anti coloniale du peuple français, du Parti communiste français ; que j’ai découvert les hauts faits d’Henri Martin, de Raymonde Dien, les combats de Madeleine Riffaud. Ainsi, dans cette prison construite par les colonialistes français, plus je devenais vietnamien, plus je découvrais le combat anticolonial du peuple français.

Après deux ans et demi de lutte quotidienne, expulsé par le régime Saïgonnais 27 jours avant la signature de l’accord de Paris, je débarquais à l’aéroport de Roissy en ao ba ba et dep rau le 1er janvier 1973. Alors que la température extérieure avoisinait le zéro, j’avais chaud. Mon père après m’avoir longuement embrassé me dit : « je suis rassuré : tu parles encore français ! ». Il avait raison dans sa plaisanterie. Mes yeux étaient en France mais mon esprit, mon cœur, ma colère et mes larmes étaient restés au Vietnam, avec mes amis encore emprisonnés. Pendant un an et demi, j’ai parcouru le monde sans relâche pour mobiliser l’opinion publique afin de forcer l’administration Nixon-Thieu à les libérer. Un des amis français qui soutenait de près mes activités militantes, Elie Mignot , alors membre du Comité Central du Parti communiste français et très attaché à la cause du Vietnam, me mettait en garde contre le danger d’aller aux Etats-Unis pour témoigner. Comme je ne l’écoutais pas, il me dit « : Enfin André, es-tu Français ou Vietnamien ? ». A ce moment là, je me sentais 100% vietnamien. Pendant toute cette période, alors que le Secours populaire français et L’Association d’Amitié Franco-Vietnamienne me fournissaient l’aide financière nécessaire pour m’habiller et me nourrir, mon seul vrai port d’attache était Mme Phan Thi Minh, membre de la délégation du GRP car c’est avec elle, sous ses conseils que je préparais mes interventions dans les différents pays où j’étais invité par les mouvements anti-guerre. Elle vit actuellement à Da Nang et je la considère comme ma maman vietnamienne.

Après la campagne Ho Chi Minh libérant totalement le Sud et réunifiant le pays, je repris simplement mon métier d’enseignant dans ma région natale près de mon père et de ma mère que j’avais laissés si longtemps seuls, moi leur fils unique. Je fondais une famille, construisais de mes mains ma maison, retrouvais mes racines paysannes du Languedoc. Mais le Vietnam ne cessait de me hanter et des images fortes ressurgissaient toujours pour me tirer vers l’autre bout du Monde, vers mes autres racines, plus récentes mais aussi fortes que mes racines biologiques. Trente années passèrent.

Lorsque fut venu le temps de ma retraite, prenant connaissance de mon dossier, je découvrais avec consternation que l’administration française avait classifié mes années de bagne saïgonnais comme  années de « congé pour suivre son conjoint ».Scandalisé, j’ai énergiquement demandé au ministère de corriger cette allégation que je considérais comme un mensonge et même comme une insulte à mon égard et à l’égard du Vietnam. Ce n’était surtout pas une petite question d’argent pour deux ans de plus : c’était une question de principe et d’honneur. Devant le refus arrogant des autorités, j’ai commencé un combat de 4 ans, appuyé par des centaines d’enseignants, viticulteurs, employés, ouvriers, sportifs, Viet Kieu, hommes politiques, dont beaucoup étaient trop jeunes pour avoir connu la guerre du Vietnam. Pendant cinq jours d’hiver glacial en 2001 et 46 jours de canicule en 2003 j’ai tenu tête aux gouvernements de gauche puis de droite sur le clocher étroit de la cathédrale de Béziers, à 60 m de haut avec mes amis qui se relayaient au pied du bâtiment pour me soutenir et me protéger. Durant ces moments très pénibles, surtout pendant les longues nuits, j’ai souvent eu besoin de me raccrocher aux images du passé pour y puiser ma force, de m’inventer la présence à mes côtés de Quoi et de ses camarades, des étudiants Lap, Mam… et d’autres frères de combat. Pour être fort, je devais redevenir 100% vietnamien. Madame Nguyen Thi Binh, pour me protéger, est directement intervenue en écrivant une lettre au Président Chirac en lui rappelant que j’étais un ami cher au peuple vietnamien.

La victoire obtenue, mes amis français ont organisé un grand repas festif au terme duquel ils m’ont offert un billet d’avion pour le Vietnam. Et c’est en 2002 que j’ai repris racines sur la terre du Vietnam. J’ai retrouvé mes amis « ta ru »( tu ra ), mon « papa » le professeur Tran Huu Khue  décédé l’an dernier; j’ai visité ma cellule de Chi Hoa, la cour de promenade : vieux fantômes que j’ai regardés bien en face pour les défier de ne jamais revenir. Partout, dans toutes les provinces, j’ai été accueilli comme un membre de la famille. J’ai reçu les honneurs des autorités, huy hieu danh du, huy chuong et huan chuong vi huu nghi… Mon vietnamien est revenu petit à petit. J’avais quitté un Vietnam meurtri et en guerre et j’ai dû reprendre mes marques dans les bouleversements d’une société en paix en plein essor. Mes séjours ont été fréquents et réguliers avec de nombreuses activités : distributions de bourses d’études à des enfants pauvres et méritants (c’est l’objectif principal de l’association ADEP dont je suis président) ; échanges pédagogiques entre enseignants français et vietnamiens ; échanges de formation professionnelle pour des lycéens français et vietnamiens ; mise en relation de partenaires vietnamiens et français pour commercialiser les vins. J’ai beaucoup travaillé avec le groupe Saigontourist. J’ai impliqué la région Languedoc Roussillon et le département de l’Hérault dans ces programmes d’échanges et de coopération.

Toutes ces activités m’ont amené à me plonger plus profondément dans la société vietnamienne actuelle, à découvrir ses caractères, ses besoins, ses problèmes, ses incertitudes. Elles ont encore augmenté la part de Vietnamien qui est en moi. Je ne suis plus « aux côtés » du Vietnam, je suis «  dans » le Vietnam. Si bien que demander la double nationalité française et vietnamienne au moment où la loi du Vietnam le permet est pour moi une chose tout à fait naturelle. Le premier dirigeant politique à qui j’en ai parlé voilà près de 3 ans est le Vice président du Comité populaire d’HCM ville, monsieur Nguyen Thanh Tai que j’avais rencontré par hasard. Comme il disait devant mes amis qu’il me considérait comme de la famille, je lui répondais en plaisantant «  Pourquoi alors ne pas m’accorder la nationalité vietnamienne ? » Ce à quoi il répondit sans hésiter : «  Fais la demande et je t’appuierai ». Le premier magazine à avoir écrit sur la question est « Nhip Cau Dau Tu » dirigé par mon ami le réalisateur Dang Nhat Minh. Voilà déjà deux ans que j’ai adressé ma demande par lettre manuscrite à l’ambassadeur du Vietnam à Paris. J’ai ensuite écrit directement du Viet Nam et de France, par lettre recommandée au Président Nguyen Minh Triet qui n’a jamais reçu mes courriers. L’an dernier, le Comité populaire d’HCM ville m’a invité à passer le Tet au Vietnam. Lors d’un repas très amical avec Mr Nguyen Thanh Tai en présence de représentants du So Ngoai Vu j’ai encore évoqué la question et les démarches se son accélérées avec l’aide de ces amis. Puis, récemment contacté directement par ses anciens camarades de combat restés très proches, le Président Nguyen Minh Triet m’a accueilli à Ha Noi avec beaucoup d’honneur et de chaleur pour annoncer l’heureux évènement. J’ai été extrêmement surpris, touché et honoré. Maintenant, depuis le 11 novembre je suis officiellement vietnamien. Le devoir solidaire avec le Viet Nam que les hasards de la vie et l’Histoire m’ont confié est devenu un devoir national. Dans le passé j’ai défendu ce qui touchait le Vietnam par solidarité. Désormais le défendrai toujours conformément aux valeurs de ce passé qui restent éternelles mais avec plus de force et de moyens car je suis Vietnamien !

Alors, chers compatriotes, si par hasard vous rencontrez dans la rue ou au détour d’une rizière un Vietnamien bizarre avec un long nez, des yeux bleus et pleins de poils sur les bras, un vietnamien qui parle souvent avec un accent approximatif et qui se trompe souvent de mots ne vous y trompez pas : en son for intérieur il est vraiment très authentiquement vietnamien.

version vietnamienne : Làm sao tôi thành người Việt Nam

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